
Immigration
Le ministre de l’Intérieur, Darmanin, flanqué du ministre du Travail, Dussopt, propose une énième réforme de l’accueil des réfugiés, qui sera discutée en novembre et votée au premier semestre.
Une nouvelle réforme du code des étrangers – la 19e depuis 1996 et la dernière datant de 2019- dénote une certaine fébrilité du pouvoir, tiraillé entre la tradition de la France « terre d’accueil » et le vote populiste de peur et d’exclusion de l’étranger de plus en plus prégnant. Visiblement la réforme envisagée opte pour la deuxième voie.
Même si certaines propositions semblent améliorer le sort des réfugiés (possibilité de travailler dès l’arrivée en France pour les étrangers originaires de pays en conflit par exemple), d’autres sont sujettes à caution. La création d’un titre de séjour « métiers en tension » est l’exemple type de la fausse bonne idée. Elle n’est d’ailleurs pas nouvelle. En 2003, Sarkozy met en place l’immigration choisie, suivie en 2006 par une carte « compétence et talents » que Valls consolidera en 2016 par la création d’’un « passeport talents ».À l’inverse, la mesure proposée là cantonne les étrangers à des métiers qui, de l’aveu même de Darmanin, ne sont « pas volés aux Français » (bâtiment, restauration) puisque dans des secteurs qui peinent à recruter. Elle échappe donc aux critiques du RN. Si le recrutement de travailleurs étrangers correspond à une demande récurrente des employeurs, elle ne concernera que très peu d’entre eux. Par ailleurs, si l’employé perd son travail, il perdra en même temps son permis de séjour.
Autres mesures
Dans un entretien réalisé par Le Monde, Darmanin, marchant dans les pas de Macron, assimile immigration et délinquance. Un seul chiffre : sur 5 millions d’étrangers, seuls 3 200 d’entre eux ont été déclarés délinquants en deux ans. Il insiste cependant sur son objectif premier : expulser les délinquants. Dans le même entretien, il affirme vouloir être « méchant avec les méchants et gentil avec les gentils ». Mais la majorité des mesures concerne tous les demandeurs d’asile : possibilité de prononcer une OQTF dès le refus de la demande d’asile de l’instance administrative (OFPRA) sans attendre l’avis de la cour de justice du droit d’asile (CNDA) ; généralisation du juge unique et jugement collégial exceptionnel ; généralisation des audiences en vidéo dans les centres de rétention ; inscription au fichier des personnes recherchées des étrangers sous OQTF, etc.
Bref, gentil ou méchant, il n’est pas bon de demander l’asile à la France.
Anne-Marie Delcamp