Une forme particulière, le théâtre d’objets, adaptée à un sujet grave, le camp-ville de Teresin où les nazis avaient enfermé des familles juives.
La compagnie ELEKTROBUS pratique à l’intention des jeunes le théâtre d’objets. Mais la futilité n’est pas son fait. Elle s’attaque ici à un récit particulièrement grave, celui de la ville concentrationnaire de Terezin, ville fantôme où les nazis ont parqué, et décimé, des familles juives. Le sujet, pour des enfants encore jeunes (à partir de 8 ans) porte une forte gravité. Présenté à des élèves qui ont ou vont aborder le sujet en cours, il n’en sollicite pas moins de leur part une écoute particulièrement attentive. Deux moyens aident à capter l’attention. L’un est le théâtre d’objets : des fils tendus autour de la scène sont garnis d’épingles à linge colorées. Elles tombent lorsqu’une voix menaçante égrène les noms de personnages qui vont disparaître. L’autre tient au texte qui sert de support au spectacle et qui est dit par Céline Pioli, seule en scène d’un bout à l’autre. Il s’agit en effet du récit, livré après sa mort, d’un vieux monsieur qui passa à Terezin une partie de son enfance.
Les enfants trompent la peur
Le récit conte que, en 1943, un groupe d’enfants juifs du camp, pour tromper la peur, créent une république clandestine et un journal clandestin. Tous les vendredis soir, ils vont se retrouver dans la baraque L417 et font la lecture de leur journal aux plus jeunes. Sont ainsi visités des chemins invisibles, tendres et poétiques. Du rêve et de la joie au milieu de l’enfer. Seule en scène, réalisatrice de la mise en scène, de l’écriture et de l’interprétation, Céline Pioli tient un pari impressionnant. On sent que tout est pensé au millimètre près, que le respect des enfants exige une qualité sans faille. On sent autour de la performance exceptionnelle de l’actrice la mise en lumière, le costume, pensé dans ses moindres détails, le décor avec les fameuses épingles à linge, la mise en son, et la voix terrifique en off de Thierry Bosc qui, portant la mort et les disparitions, accentue le contraste.
Yvette Lucas