LE TRAVAILLEUR CATALAN

Le rideau tombe, les projecteurs s’éteignent, seule la servante* du théâtre reste allumée. Elle protège le lieu mais cette fois elle est plus seule que jamais. Un monstre sacré est parti. Le monde du théâtre pleure la disparition d’un monsieur exigeant, qui n’existait qu’à travers ses personnages. Il pleure ce jeune homme qui sonnait à la porte d’un sociétaire de la comédie française pour lui réciter des vers de Musset. Il pleure une époque révolue. Michel Bouquet était l’un des derniers en son genre, indépendant, rigoureux, amoureux des mots et de leurs couleurs. Il nous a offert durant sept décennies une filmographie et une carrière théâtrale sans faille. Le théâtre était son moteur de vie et n’aurait pu se passer de ce lieu : il disait à ce propos qu’il aurait fait n’importe quoi, «balayer le plateau ou distribuer les accessoires », pourvu que ce soit dans un théâtre. Michel Bouquet tire sa révérence l’année où la France commémore les 400 ans de la naissance de son auteur fétiche, Molière. Sa dernière pièce aura été Tartuffe. La boucle est bouclée. La peine et le vide qu’il laisse sont énormes. Salut l’artiste ! Et merci.

Anne Guichet

*Servante : lampe posée sur un haut pied qui reste allumée quand le théâtre est plongé dans le noir et déserté entre deux représentations ou répétitions. Elle veille lorsqu’il n’y a plus personne.

 
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