
Mayotte
À partir du 20 avril, une armada de 500 gendarmes sera envoyée en renfort à Mayotte pour expulser 3 000 sans-papiers.
Pour déchiffrer ce qui se passe à Mayotte, il faut revenir sur son histoire et surtout sur sa récente histoire française pour en comprendre les enjeux. Les deux îles de Mayotte, Grande-Terre et Petite-Terre font partie de l’archipel des Comores, à 8 000 kilomètres de la France, perdues dans l’Océan Indien à quelques encablures de l’Afrique. Suite à un referendum truqué, la France a obtenu la « propriété » des îles de Mayotte. Elles sont devenues le 101ème département français en 2011. Mais ses habitants n’ont pas les mêmes droits que les Français ! Le droit du sol, par exemple (le droit d’obtenir la nationalité française à partir de 13 ans), a déjà été conditionné par la loi immigration de 2018 à trois mois de présence d’un des parents sur le territoire. L’objectif était déjà de réduire l’immigration massive des Comoriens des îles voisines. La nouvelle loi immigration de Darmanin, votée en ce mois d’avril, rallonge à un an la présence d’un des parents sur le département de Mayotte, assortie d’un « visa d’installation pour le travail, les études, la famille ».
Jeter à la rue
5 000 personnes…
Il faut aussi savoir que 77 % de la population de Mayotte vit sous le seuil de pauvreté et que 40 % des résidences principales sont des cases en tôles.
C’est dans ce contexte que le gouvernement français a décidé d’envoyer 500 gendarmes pour détruire les bangas, ces bidonvilles où vivent 30 % de la population, jetant à la rue 5 000 personnes. Et tant qu’à faire, en profiter pour expulser 3 000 Comoriens des îles voisines venus à Mayotte au péril de leur vie – 30 000 noyés depuis 1995 avec la création du visa Balladur – dans les mêmes conditions que les Africains qui tentent de traverser la Méditerranée, mais dont on ne parle pas.
Une fois leurs cases détruites, ces sans-papiers comoriens ne pourront plus justifier d’un logement. Et la préfecture sera habilitée à leur refuser un titre de séjour pour « défaut de domiciliation ». Cela ne surprendra pas les lecteurs du T.C. La loi Darmanin d’expulsion des 3 000 Comoriens sans-papiers de Mayotte pourra s’appliquer sur ordonnance, sans vote du parlement.
Une preuve de plus de la fin de la démocratie dans notre pays. Et une interrogation de plus sur la présence impérialiste en France dans ces îles lointaines.
Anne-Marie Delcamp
Merci à Josie Boucher pour son alerte et sa supervision…