Justine Triet a reçu la Palme d’Or du festival de Cannes 2023 pour son film Anatomie d’une chute. Une femme lauréate, le fait est déjà notable puisqu’elle n’est que la troisième pour cette récompense sur, tout de même, 76 éditions ! Côté parité Cannes a encore du chemin à faire.
À l’annonce du palmarès, Justine Triet ne s’est pas contentée de remerciements convenus, elle a fait une déclaration qui a marqué, disant, notamment, « cette année le pays a été traversé par une contestation historique, extrêmement puissante, unanime, de la réforme des retraites. Cette contestation a été niée et réprimée de façon choquante, et ce schéma de pouvoir dominateur de plus en plus décomplexé éclate dans plusieurs domaines, évidemment socialement c’est là où c’est le plus choquant, mais on peut aussi voir ça dans les autres sphères de la société et le cinéma n’y échappe pas… » Elle dénonçait ensuite la « marchandisation de la culture » défendue par « le gouvernement néolibéral », marchandisation en train de casser « l’exception culturelle française. »
On était bien loin des paillettes et du tapis rouge, en quelques mots, la réalisatrice a remis les choses à leur place. Il nous faut saluer sa détermination, et son courage. Bien sûr, cette déclaration a suscité les cris d’orfraie de toute la droite, macronie en tête. Des réactions qui mettent ni plus ni moins en cause le droit d’expression, le droit de critique. Réactions d’autant plus vives que Justine Triet tape juste. Oui, la culture est à la peine dans notre pays, les exemples abondent. La pandémie a laissé des traces, les subventions sont à la baisse (voir le cas extrême de la Région Auvergne-Rhône-Alpes et la saignée opérée par Laurent Wauquiez), d’importantes structures culturelles sont gravement affaiblies, d’autres s’interrogent sur leur survie. Dans le même temps les multinationales prennent la main sur de gros festivals véritables machines à fric, transformés en produits de consommation.
Dans un tel contexte on ne saurait se plaindre que des Justine Triet sonnent l’alerte.
