
Coronavirus. Le président américain menace d’exiger des Chinois des réparations énormes pour leur « supposée » responsabilité dans l’apparition du virus.
En difficulté au plan intérieur pour sa gestion catastrophique de la crise du covid-19, Trump évoque la possibilité d’exiger de la Chine des réparations à titre compensatoire. Après ses élucubrations sur l’ingestion de désinfectant pour combattre l’épidémie, le locataire de la Maison Blanche n’a pas hésité à brandir l’arme financière et économique. Seulement les temps ont changé. La Chine de 2020 n’est plus celle du début du vingtième siècle, où les puissances occidentales, profitant de la révolte des Boxers, faisaient main basse sur de vastes pans de l’économie chinoise. En installant des « concessions » ou « légations » dans les grandes villes, ces puissances mettaient, de fait, les autorités du pays sous tutelle. Les Chinois n’ont jamais oublié cette période qu’ils ont vécue comme une humiliante vexation. Leur sentiment national s’en est trouvé exacerbé.
Les rôles se sont inversés
Aujourd’hui la Chine détient environ 1 170 milliards de dollars (950 milliards d’euros) d’obligations du Trésor américain, ce qui en fait le créancier étranger numéro un des États-Unis et le deuxième propriétaire de titres du gouvernement américain après la Réserve fédérale des États-Unis. Jeff Klingelhofer, gestionnaire de portefeuille chez Thornburg Investment Management, est affirmatif :
« Si (la Chine) voulait appuyer sur le bouton nucléaire monétaire, si elle était déterminée à liquider ses bons du Trésor, cela aurait un impact immédiat et temporaire sur les marchés monétaires aux États-Unis ».
Brad Setser, du Council on Foreign Relations à New York, estime que la Chine peut vendre des bons du Trésor et acheter de la dette européenne ou japonaise à plus faible rendement. Plus vraisemblablement selon Brad Setser, si la Chine voulait faire monter les enchères, elle laisserait le yuan se déprécier face au dollar américain. Une telle décision anéantirait l’objectif de relance de la production américaine affiché par l’administration Trump. Le yuan est actuellement à son plus haut niveau depuis deux ans et demi.
Une posture impérialiste dépassée
L’analyse des rapports de force avec la Chine du président américain date d’une autre époque. Depuis plusieurs dizaines d’années, « l’Empire du milieu » n’est plus ce pays affaibli sur lequel les occidentaux venaient « s’essuyer » les pieds. C’est un pays moderne et puissant dont l’influence ne cesse de grandir dans le monde. Les États-Unis ne sont plus en mesure de dicter leur loi au régime de Pékin. Les rodomontades de Trump ne sont là que pour masquer la faillite de sa gestion de la crise sanitaire à l’intérieur. Fidèle à son image d’éléphant dans un magasin de porcelaine, le président des États-Unis a sans doute voulu « montrer les muscles » pour conforter son électorat à six mois des présidentielles. C’est un jeu dangereux qui pourrait mettre en péril la stabilité et la paix dans le monde.