LE TRAVAILLEUR CATALAN

SNCF, mouvement de grève des cheminots

 La récente grève des cheminots, a fait couler beaucoup d’encre. Dénigrée par une majorité de média, par le ministre des transports et par le président de la SNCF, elle a malgré tout été un succès. Le Travailleur catalan a fait le point avec un responsable régional CGT, Lucas Mas.

Comment ce mouvement de grève est-il né, pourquoi cette grogne et quelles catégories de cheminots concerne-t-il ?

Depuis des années les cheminots se mobilisent lors des négociations annuelles obligatoires sur la question des salaires et plus généralement sur la question de la répartition des richesses. L’entreprise rencontre de plus en plus de mal à recruter ou à fidéliser les nouveaux embauchés suite à la suppression du statut des cheminots et des salaires trop bas pour les nouveaux salariés. Ce mouvement de grève concernait plusieurs actions distinctes : une action des conducteurs de train portée par la CGT sur les dates du 5 au 7 mai et une action des contrôleurs de train du 5 au 7 également à l’appel de la CGT et une action à l’appel d’un collectif national de contrôleurs et de Sud Rail sur le week-end du 9 au 11. Le 5 juin, une action « Tout service »sera organisée, concernant l’ensemble des cheminots, car nous sommes tous concernés par la baisse des salaires, contrairement à ce que dit le président de l’entreprise.

Cette grève a-t-elle été bien suivie ? Suffisamment suivie ? Dans les P.-O., en Région Occitanie, nationalement ?

Environ 1 cheminot sur 2 au niveau national était en grève sur cette première séquence de grève et ce malgré une campagne médiatique de dénigrement de la part de la direction de la SNCF et du gouvernement usant sans aucune honte et retenue de mensonges et fake news.

Nous avons fait face à des disparités selon les activités (Fret, TGV TER ou Inter-cité) et selon les régions également.

Sur le département des P.-O., nous étions 95% de conducteurs à TER et environ 15% à TGV en grève. Mais les effectifs, notamment sur ces périodes, à TGV permettent de limiter les impacts sur la production.

Votre « patron » SNCF semble être droit dans ses bottes, ne rien vouloir lâcher, et se multiplie pour dénigrer vos actions. Qu’en pensez-vous ?

Oui bizarrement, nous avons entendu le PDG et le ministre des transports utiliser les mots « usagers » et « transports public ». Dès lors qu’il y a une grève à la SNCF, nous assistons à un phénomène étrange, d’un coup de baguette magique ou médiatique les voyageurs ne sont plus des « clients », ils redeviennent des « usagers des services publics ».

Avec l’appui de nombreux médias  « meanstream » on a pu assister à un déferlement de mensonges les uns plus gros que les autres pour expliquer que les cheminots SNCF ont bénéficié d’augmentations de salaire au-delà de l’inflation mélangeant à l’occasion les augmentations générale de salaire avec l’augmentation moyenne des salaires liés à l’ancienneté et la promotion dans l’entreprise. Par la suite ils ont également osé tenter de minimiser la grève en expliquant qu’il n’y avait pas d’impact, et dans le même temps ils parlent sans aucune honte et aucun respect de « prise d’otage », souhaitant un durcissement voire l’interdiction de faire grève. Étonnant de vouloir interdire la grève si celle-ci n’a pas d’impact. Et pour couronner le tout, le ministre des transports TABAROT a dans un premier temps tenté de discréditer la grève en expliquant que les revendications n’étaient pas légitimes (Effectivement qui de mieux placé pour parler de légitimité que lui: issu du parti LR qui a terminé 4eme aux dernières élections législatives, il a été nommé par un président de la république issu du parti LREM qui est arrivé 3ème a ces mêmes élections). Et dans un deuxième temps, il a expliqué que les cheminots ne seront pas en grève le 8 mai car les jours fériés sont payés double. Encore une fois loupé! Le STATUT des cheminots SNCF entreprise publique ne prévoit pas que les jours fériés soient payés double comme dans certaines entreprises, nous sommes payés quelques euros supplémentaires et pas uniquement sur la base du volontariat. Sur ce coup on va être tolérant et  excuser ses approximations, on sait que Monsieur TABAROT est occupé à répondre aux juges du parquet national financier et préoccupé par l’enquête qui le vise pour détournement de fonds publics et prise illégale d’intérêt. En résumé un ministre irréprochable qui vient nous expliquer la légitimité de nos revendications sur une augmentation de salaire pendant que celui-ci recevait de l’argent public à travers des montages et des emplois.

Il y a beaucoup d’incompréhensions chez les usagers. Du moins, c’est ce qui apparaît dans tous les reportages. Qu’en pensez-vous ?

Il y a, je pense, beaucoup d’incompréhensions chez les usagers. Du moins, c’est ce qui apparaît dans tous les reportages. Qu’en penses-tu ?

Les reportages à disposition du grand public sont aujourd’hui malheureusement orientés. Aller sur un quai de gare et demander à un voyageur ce qu’il pense de la future grève qui va l’impacter, ce n’est pas du journalisme, c’est juste relater le sentiment d’une personne pour faire sensationnel.

La vérité c’est qu’aujourd’hui 98% des désagréments subis au quotidien par les usagers n’ont rien avoir avec les grèves. Et malheureusement sur le département nous le constatons trop régulièrement. Fermeture partielle de la ligne Perpignan Villefranche suite à un accident sous le pont routier d’Eus, suppression de trains par manque de personnel ou pour cause d’absence de matériel, capacité des rames non adaptées ou sous dimensionnées ne permettant pas certains usagers à prendre les trains, organisation de production contrainte par les dernières réforme et par conséquent ne permettant pas une offre de report sur d’autres trains, impossibilité de réaliser certaines correspondances pour les mêmes raisons d’organisation dans l’entreprise, saturation de certains axes, complexité et augmentation des tarifs… ça c’est le quotidien des millions d’usagers mais ce sont surtout les conséquences des différentes réformes du ferroviaire contre lesquelles la CGT et les cheminots se sont battus.

  L’intérêt commun usagers-salariés a du mal à s’imposer dans les esprits. Comment faire mieux?

Nous devons continuer à construire avec des comités d’usagers, les citoyens, les entreprises locales également, des projets pour le développement du transport ferroviaire tant voyageurs que de marchandises. À la CGT, nous travaillons quotidiennement pour que les différents modes de transport ne soient pas en concurrence mais qu’ils soient complémentaires et surtout qu’ils soient au service des usagers et citoyens.

Plus globalement, nous devons remettre ce concept « d’intérêt commun » au centre de nos préoccupations en tant que citoyens. Que ce soit dans les transports publics multimodaux, la santé, l’éducation, l’énergie, la sûreté, la communication, l’habitat ou sur des questions sociales comme l’écologie.

Comment faire mieux ? Nous n’avons pas la recette miracle, bien que certains savent actionner les leviers pour éviter justement ces convergences entre usagers et citoyens. Dans la période de crise que nous traversons, nous constatons malheureusement un repli des individus sur eux-mêmes et chercher, chez l’autre, le bouc émissaire de ses propres problèmes. Le partage des richesses n’a jamais été autant déséquilibré entre les plus riches et le reste de la population. Pour eux seuls la guerre, le dénigrement, la peur, la dictature, le fascisme permettront d’augmenter ou de maintenir leur richesse. À l’inverse, c’est la tolérance, la paix, le vivre ensemble, le respect dans un monde démocratique qui permettront une réelle et juste répartition des richesses.

Propos recueillis par Michel Marc

 
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