LE TRAVAILLEUR CATALAN

Harcèlement scolaire

Le nouveau plan de lutte contre le harcèlement annoncé par le gouvernement risque fort, en ne prenant pas le problème dans sa globalité et en se donnant pas le moyen, de se révéler totalement inefficace.

Mercredi 27 mars, le gouvernement a dévoilé son plan interministériel anti-harcèlement scolaire. Déjà la rentrée 2023 avait vu le programme de lutte contre le harcèlement à l’école (PHARE), mis en place dans les écoles et collèges à la rentrée 2022, être étendu à la totalité des établissements scolaires. Le nouveau plan de lutte interministériel (éducation, police, justice, santé, sport), basé sur des solutions le plus souvent purement techniques, a au moins le mérite d’associer les parents.
Mais il y avait urgence à agir. Selon les enquêtes, 15 % des collégiens déclarent s’être sentis harcelés au cours d’une année scolaire. Près d’un million d’enfants vivent une situation de harcèlement à l’école, harcèlement qui conduit à des fins tragiques avec une hausse de 300 % de tentatives de suicide chez les moins de 15 ans au cours des dix dernières années.
Prendre le problème dans sa globalité
Mais cette nouvelle initiative gouvernementale risque fort de rester inefficace. Car la réalité du harcèlement est beaucoup plus complexe que les discours ministériels veulent le faire croire. Ses causes dépassent largement le seul milieu scolaire, même si c’est l’endroit où il s’exprime le plus souvent. Parmi les facteurs de risque, certains peuvent être liés à l’école, mais il existe beaucoup d’autres facteurs. Ils peuvent être familiaux, liés à l’exclusion sociale, à l’influence des pairs, à des causes idéologiques…
De plus, on en reste souvent à désigner une victime et un bourreau alors qu’en réalité le harcèlement en milieu scolaire est essentiellement collectif. Un jeune est pris en grippe et désigné par un groupe qui va se donner une identité collective contre un autre. C’est d’abord un refus de la différence. Et comment progresser en matière de lutte contre le harcèlement quand ce refus devient un moyen de se faire élire ou de faire de l’audience dans une émission de télévision (voir la télévision Bolloré). Le combat contre le harcèlement est donc éminemment politique.
Se donner les moyens
Enfin, au-delà des slogans percutants, les moyens humains, indispensables face à l’ampleur de la tâche, seront-ils au rendez-vous ? « L’angle mort reste le nombre d’adultes à mettre dans les établissements scolaires », déplore Sophie Vénétitay, secrétaire générale du Snes-FSU. « Pour qu’un élève parle, il faut qu’il se trouve en confiance. Il ne va pas calquer sa prise de parole sur le planning de l’infirmier, absent ce jour-là car il doit jongler entre quatre établissements scolaires. » D’autant plus que les enseignants manquent de formation sur la question et « se sentent très seuls dans leur classe ».
En un mot, la solution ne viendra pas du programme gouvernemental, mais bien d’une réévaluation globale de la politique de lutte contre le harcèlement scolaire.
Bastien Sacaze et René Granmont

 
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