LE TRAVAILLEUR CATALAN


Visa 2024


Jusqu’au 15 septembre, le 36ᵉ festival international du photojournalisme investit Perpignan pour une séquence de confrontation et de débats sur les enjeux et les conflits du moment.

Comme à chaque rentrée, Visa propose une vision de l’état du monde, un monde qui ne va pas bien. Le lancement du festival, entre conférence de presse et inauguration, est souvent l’occasion, pour le directeur, Jean-François Leroy, ou pour les politiques locaux, de faire des déclarations plus ou moins tonitruantes.

Lors de cette édition 2024, le sujet sensible est le conflit Israël-Palestine. Au printemps dernier, selon Jean-François Leroy, il ne devait pas faire l’objet d’une exposition. À l’arrivée, il y en a deux, dont celle de Loay Ayyoub, La tragédie de Gaza, qui a reçu le Visa d’or de la ville de Perpignan Rémi Ochlik. De plus, ce conflit était évoqué lors de la soirée de projection du 5 septembre, mais « de façon très factuelle », a jugé bon d’ajouter le directeur du festival, inquiet des anathèmes qui pourraient tomber.

Le maire Aliot Louis en syncope

L’exposition de Loay Ayyoub ne passe décidément pas auprès du maire de Perpignan qui, rageur, a décrété qu’il ne remettrait pas le prix au journaliste, pratiquement assimilé à un terroriste. Louis Aliot s’est lancé dans une diatribe aux forts accents islamophobes. On aurait aimé voir Jean-François Leroy prendre ses distances, ce qu’il n’a pas fait, se contentant de dire que le maire de la ville le laissait entièrement libre de ses choix. Saluons à l’occasion les propos d’Agnès Langevine, vice-présidente de la Région, appelant à la paix à Gaza, en Ukraine, au Soudan, et à la lutte contre l’extrême droite.

Loay Ayyoub, journaliste palestinien correspondant du Washington Post, a passé cinq mois dans l’enfer de Gaza sous les bombes israéliennes avant d’être exfiltré en Égypte. Il est en attente d’un visa pour venir à Perpignan recevoir son prix. Ses photos sont bouleversantes ; elles montrent bien qu’à Gaza, les victimes sont majoritairement des enfants. À voir absolument, ainsi que l’expo de Sergey Ponomarev sur ce que vivent les Palestiniens de Cisjordanie : attaques des colons, de Tsahal, tracasseries multiples. Les deux aux Minimes.

Partout dans le monde, la détresse et la souffrance, mais pas que… Du bonheur aussi, de l’étonnant et de l’inédit…

Impossible d’évoquer toutes les expositions, mais voici quelques-unes, marquantes. Celle de Cinzia Canneri (Prix Camille Lepage 2023) : Le corps des femmes comme champ de bataille. Femmes érythréennes et tigréennes, victimes de viols individuels ou collectifs, esclaves sexuelles, mutilées, torturées, de plus rejetées par leurs maris, qui essaient malgré tout de se reconstruire. Images en noir et blanc, beauté et dignité (Minimes).

Émouvante rétrospective de Paula Bronstein, trente années aux quatre coins du monde et toujours un angle juste, pertinent (Minimes).

Étonnantes images que celles de Jean-Louis Fernandez, Comédie-Française : histoires de théâtres. Les actrices et acteurs en coulisses, lors d’un moment de détente, ou au démaquillage… 

Du jamais vu (Minimes).

Mais aussi : Mayotte, la République Démocratique du Congo, le Soudan, Haïti, les Talibans, le danger des écrans pour les jeunes…

Les drames ne sont pas qu’ailleurs, comme le montre La France périphérique de Pierre Faure, qui documente la pauvreté dans notre pays ; le noir et blanc des images accentue l’impression de tristesse (Hôtel Pams).

Notons aussi la réouverture de la Casa Xanxo restaurée, qui propose l’exposition d’Alejandro Cegarra sur le durcissement des politiques migratoires au Mexique.

Enfin, les Jeux Olympiques à l’église des Dominicains.

Expos en entrée libre tous les jours de 10h à 20h jusqu’au 15 septembre, avant les deux semaines scolaires.

Nicole Gaspon

 
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