Dans leur procès pour détournement de fonds publics, Marine Le Pen et ses coïnculpés risquent de lourdes peines, dont celle d’inéligibilité.
Vingt-cinq personnes, dont Marine Le Pen et Louis Aliot sont devant le tribunal correctionnel de Paris pour avoir mis en place, entre 2004 et 2016, un « système de détournement » de l’argent versé par l’Union européenne pour l’embauche de collaborateurs parlementaires, afin de financer les activités politiques de leur parti. Un préjudice estimé à près de sept millions d’euros par le Parlement européen.
Dans leur réquisitoire, les procureurs ont réclamé cinq ans de prison à l’encontre de Marine Le Pen, dont deux ans ferme, 300 000 euros d’amende ainsi que cinq ans d’inéligibilité. Ils ont demandé pour Louis Aliot 18 mois de prison, dont six ferme, 30 000€ et trois ans d’inéligibilité. L’accusation a demandé que la peine d’inéligibilité soit assortie d’une exécution provisoire, ce qui signifie qu’elle s’appliquerait immédiatement en cas de condamnation, y compris en cas d’appel. L’inéligibilité pourrait en particulier priver la cheffe des députés RN d’une quatrième candidature à l’Élysée en 2027.
On pouvait s’attendre à une réquisition aussi ferme tant les faits ont été évidents, tant ils sont graves, tant les réponses des uns et des autres des coprévenus ont été confuses. Comment croire que Louis Aliot, docteur en droit, ancien avocat, ou son ancienne compagne, Marine Le Pen, elle aussi avocate, ne connaissaient pas les règles du droit ?
Une campagne aux accents complotistes
En réponse au parquet, le parti d’extrême droite a lancé une contre-offensive aux accents complotistes visant à décrédibiliser la justice. Ceux-là mêmes qui hurlaient au laxisme trouvent soudain la justice trop sévère, les loups sont devenus des agneaux … Depuis l’annonce des réquisitions, les cadres du RN, qui, selon toute probabilité, s’attendaient à une note salée au vu des éléments accablants présentés durant le procès, et avaient eu le temps de roder leur contre-attaque, crient au complot : « Justice politique », « parquet indigne et politisé », « démocratie bafouée », « tentative d’éliminer violemment Marine Le Pen »… Sur les plateaux, les politesses ont fusé à l’encontre de la magistrature. Un assaut médiatique qui présente, pour l’extrême droite, un double intérêt : détourner le débat pour qu’il ne porte plus sur le cœur de l’affaire (un détournement de sept millions de fonds publics), et alimenter la rhétorique aux accents trumpistes d’un « système politico-judiciaire » qui, de l’Assemblée au tribunal, comploterait contre « le parti du peuple ».
Rappelons-leur simplement que la même justice s’applique à toutes et tous ! Il n’y aurait aucune raison que Marine Le Pen ou Louis Aliot bénéficient, du simple fait qu’ils sont des élus, d’un régime d’exception.
René Granmont