LE TRAVAILLEUR CATALAN

Migrants

Professeur au Collège de France, le sociologue et démographe François Héran explique que le débat public en France sur l’immigration est sans rapport avec la réalité.

Face aux discours incontrôlés et indéfiniment répétés sur « le grand remplacement » mieux vaudrait analyser sainement la réalité plutôt que poursuivre des objectifs démesurés et irréalisables. 

Première idée fausse : la France bat le record en matière d’entrée d’immigrés sur son territoire. Il y a certes depuis les années 2000 une hausse générale venant après une longue stagnation. Elle s’inscrit dans une évolution qui constitue une dynamique mondiale. De plus il convient d’examiner la nature des titres de séjour accordés, certes en augmentation de 37 %, mais qui s’explique surtout par la migration estudiantine (54%), la migration de travail 27%), la migration de refuge étant la plus faible.

Nous sommes loin d’être les champions de l’asile

S’agissant par exemple des grandes vagues d’exilés venus du Moyen Orient, de 2014 à 2021, les relocalisations et demandes d’asile enregistrées par Eurostat (et en supposant que tous les déboutés restent) les effectifs accueillis en France s’élèvent à 36 900 Syriens (pour la France 3% des demandes enregistrées, 53% pour l’Allemagne), 14 100 Irakiens (France : 4%, Allemagne 48%), 49 300 Afghans ( France 8%, Allemagne 36%). En revanche, la France a davantage enregistré de demandes de ressortissants d’autres pays, beaucoup venant d’Afrique et aussi de Turquie, Pakistan, Bangladesh. Sachant que les trois-quarts environ de ces demandes ont été rejetées. 

Les actions sont décalées par rapport aux ambitions

On constate par ailleurs que, faute de moyens adéquats, seulement 15% des obligations de quitter le territoire sont exécutées. Sachant aussi que plus les gens sont demeurés longtemps, plus il est difficile de les expulser, surtout quand beaucoup ont été employés clandestinement et ont même à ce titre payé des impôts.

En fin de compte, sachant que les immigrés représentent aujourd’hui en France 10,3% de la population, on constate que les mesure prises, les actions engagées correspondent, selon François Héran, à des « rêves immatures », des objectifs démesurés, tout comme par exemple, pour donner du travail aux immigrés la recherche des « métiers en tension », carrément irréalisable. Pensons aussi à l’empilement infini des circulaires, à des idées volontaristes détachées de la réalité, autrement dit, pour parler familièrement, sur la question des migrants, notre gouvernement est totalement à côté de la plaque.

Yvette Lucas

 
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