
Édito n° 4031
Pour faire accepter un tour de vis austéritaire inconnu depuis très longtemps, on nous abreuve de chiffres. Mais surtout, on ne demande pas aux citoyens d’élaborer démocratiquement les projets pour l’avenir et les moyens de les réaliser. On leur demande simplement de choisir entre les sacrifices imposés : quel service public casser ? quelle collectivité territoriale étouffer ? quels travailleurs ou retraités tondre ? Sous couvert de compétitivité du capitalisme financier, il est interdit de discuter de fiscalité sur le patrimoine, sur les énormes dividendes. Mieux, il est interdit de débattre de la nature de la dette qui enfle avec les intérêts de celle-ci.
Pour éviter ce débat, Michel Barnier qui disait vouloir que la discussion se déroule à l’Assemblée, menace aujourd’hui du 49.3. En d’autres termes, la discussion est libre, mais c’est moi qui décide, … avec le président de la République qui ne saurait y être étranger, quand bien même il affecte de regarder ailleurs. Après le déni démocratique qu’a été la nomination d’un Premier ministre issu d’une formation représentant à peine 6 % des voix et surveillé, selon les propres termes de Marine Le Pen, par le Rassemblement national, ce serait un nouveau coup de force contre la représentation nationale.
Face à cette saignée budgétaire, qui risque fort d’achever des services publics et des collectivités locales déjà mal en point, comme elle risque d’appauvrir encore plus nombre de foyers de travailleurs, les parlementaires du Nouveau Front populaire ont effectué leur travail d’amendements à la commission des Finances de l’Assemblée nationale. Grâce à 127 amendements visant les grandes fortunes et les superprofits, ils avaient abouti à 60 milliards de recettes nouvelles sans toucher aux classes moyennes et populaires. Puis … patatras ! Tout est parti en fumée grâce à une conjonction de voix de députés macronistes, de LR et … d’élus du Rassemblement national !
La fibre populaire de ce dernier disparait très vite dès lors qu’il faut défendre les riches. Mais cela ne saurait étonner ceux qui, refusant de prendre des vessies pour des lanternes, ont regardé de près le projet budgétaire du parti d’extrême droite. Derrière le discours de façade, toutes les propositions s’inscrivent, parfois même en les aggravant, dans la vision macroniste ultra-libérale, du texte de l’exécutif. On comprend mieux alors comment la question de l’immigration n’a pour rôle que d’occulter ces véritables choix.
Une dérive autoritaire, un échec économique venant sanctionner la politique de l’offre et du ruissellement d’Emmanuel Macron, et un gouvernement qui ne doit son existence qu’à l’extrême droite : c’est ce que les vrais républicains et les démocrates doivent regarder en face pour se rassembler.
René Granmont

