Visa 35e

Expos et soirées continuent d’attirer un public nombreux, signe de l’intérêt de nos concitoyens pour l’état du monde.

On le redit chaque année, le succès de Visa ne faiblit pas, même au bout de 34 ans. Dès l’ouverture, samedi matin, les foules se pressaient aux expositions, on peut supposer qu’il en sera de même jusqu’au 17 septembre et que de longues files d’attente précéderont les soirées de projection. Le festival est en effet l’occasion d’un face à face avec les images de la plupart des événements qui ont émaillé l’année, les conséquences qui en ont résulté, les inquiétudes qu’ils ont suscitées. Inquiétudes, car les sujets joyeux sont rares, actualité oblige.

Quelques-unes des vingt-quatre expositions

Le dérèglement climatique y est en bonne place comme les tragédies qu’il entraîne pour tant de populations.

L’Ukraine, bien sûr, les photos de Tyler Hicks (Minimes) sur « l’anéantissement » de Bakhmout sont terribles, des hommes et des femmes quasi fantomatiques, visages fermés, circulant parmi la boue, le sang, les ruines, soldats blessés, scènes, hélas, sans cesse recommencées.

Il fait froid dans le dos le reportage de Mark Peterson (Minimes) intitulé Le passé n’est jamais mort en référence à une citation de Faulkner « Le passé n’est jamais mort, il n’est même jamais passé. » Pas vraiment optimiste Faulkner, comme ce reportage qui montre que le racisme et les idées d’extrême droite n’ont jamais cessé, voire pire, aux USA, en dépit du passage d’un président noir. Images à mettre en regard avec la montée de ces idées nauséabondes, pas qu’en Amérique.

Un vrai coup de cœur, les images de Stéphanie Sinclair Grossesses à haut risque après l’arrêt Dobbs (Minimes). On se souvient qu’un nouvel arrêt de la Cour suprême des États-Unis permet à chaque État de réglementer l’accès à l’avortement. C’était la porte ouverte à toutes les régressions, ainsi l’État de l’Ohio a interdit l’avortement dès lors que l’activité cardiaque du fœtus est détectée. Stéphanie Sinclair est allée à la rencontre de patientes d’une clinique de Cleveland, elle montre les conséquences de cette décision sur les femmes et les médecins. Ses émouvantes images en noir et blanc racontent des histoires d’espoir, d’angoisse, d’attente. La peur se lit dans certains regards de femmes dont la grossesse risque de mal se terminer. Le courage que demandent certaines décisions, tant des patientes que des soignants.

Ebrahim Noroozi montre l’Afghanistan « le pire pays pour les femmes » (Minimes), ses photos en couleur, presque gaies, confirment une réalité atroce, les femmes invisibilisées, confinées, obligées de renoncer à tout. Et la misère, la famine, qui contraint au travail des enfants, des bambins de 8, 9 ans s’épuisent dans une briqueterie, on verra une fillette endormie dans la poussière noire.

Et toutes les autres expositions, à découvrir, sans oublier la bonne centaine du off.

Nicole Gaspon