
Théâtre de l’Archipel
Molière de la comédie 2017, « Bigre » de Pierre Guillois a soulevé l’enthousiasme du public de l’Archipel avec un mélo burlesque, drôle et terriblement touchant.
Un décor de bric et de broc pour trois mansardes exiguës sous les toits. Trois locataires : un gros homme, un grand maigre et une blonde pulpeuse. Pendant plus d’une heure, ces trois hurluberlus, cabossés par la vie, vont, sans paroles, se croiser, se désirer, se menacer, tenter de s’aimer dans une avalanche de gags et de catastrophes qui vont aller crescendo jusqu’à l’apothéose finale.
Ces personnages clownesques, qui se prennent le pied dans le tapis à tout instant, déclenchent ces rires salvateurs qui nous emportent, pauvres humains, quand le burlesque naît de la représentation de nos travers, nos mesquineries, nos désillusions et nos dérisoires maladresses.
Rire de la solitude
Le thème central de cette pièce, que son auteur Pierre Guillois définit lui-même comme un « mélo burlesque », c’est bien la solitude. Il a voulu parler de « ces petites gens dont les vies pourraient être chouettes s’il n’y avait pas toutes ces merdes qui nous arrivent sans cesse ». Un travail inspiré du cinéma muet : il y a du Buster Keaton, en passant par Mister Bean ou par le théâtre de Jérôme Deschamps. Ces personnages nous touchent par leur humanité, leurs désirs contrariés, leur tendresse, une émotion qui nous suit tout au long du spectacle. Une mise en scène réglée au millimètre, un canevas de situations qui répondent à une mécanique très précise, à la fois au niveau du jeu, mais aussi de la machinerie. Les effets spéciaux sont en effet assez nombreux, le son très important et la gestion des accessoires « monstrueuse ». Pierre Guillois s’impose comme un dramaturge pour qui l’humour est un engagement métaphysique et non un simple ressort dramatique. Autant dire que son travail est essentiel et incontournable.
J. P.

