LE TRAVAILLEUR CATALAN

UPTC

La mémoire de Perpignan dans les œuvres de Claude Simon, tel était le thème de la conférence de Jean-Yves Laurichesse, écrivain, professeur émérite de littérature à l’université Toulouse-Jean Jaurès, prononcée lors de la librairie de Noël tenue en partenariat avec l’Université populaire du Travailleur catalan, le 9 décembre dernier.

Le conférencier commençait par mettre en scène le lien maternel, lien matriciel, qui unit Claude Simon à la ville de Perpignan. Sa mère était, en effet, issue d’une famille bourgeoise de cette ville et elle y rencontra, militaire en garnison à la citadelle, celui qui deviendra son père et décédera beaucoup trop tôt. C’est à Perpignan qu’il passe son enfance, dans l’hôtel particulier situé 12 rue de la Cloche d’Or, jusqu’au décès de sa mère, qui survient alors qu’il n’a que onze ans. Il restera profondément attaché à cette ville, même si plus tard il s’installe dans une propriété dont il hérite à Salses où l’exploitation de la vigne lui permet de subvenir à ses besoins jusqu’à l’obtention du prix Nobel en 1985.

Présence de Perpignan dans des œuvres majeures  

Les souvenirs de cette enfance perpignanaise le marquent et jouent un rôle important dans cinq de ses grandes œuvres, que sont Le Vent, Histoire, Les Géorgiques, L’Acacia et Le Tramway. La ville n’y est jamais nommée, car il avait l’habitude d’effacer les noms propres, suivant en cela un précepte d’André Gide prescrivant d’atteindre à l’universalité en approfondissant le particulier. Élevé dans un milieu catholique conservateur, il s’en démarque, s’y oppose même et en tire des portraits parfois proches de la caricature. A contrario, on trouve dans Le Tramway, la description d’un ouvrier blessé empreinte d’une vraie empathie. C’est dans cette œuvre, la plus autobiographique de toutes, que la ville de Perpignan est le plus abondamment présente. Claude Simon y évoque le déclin des anciennes familles, remplacées par d’autres nouvellement enrichies.

à la recherche du temps perdu …

Jean-Yves Laurichesse s’appuie sur d’amples extraits pour montrer combien, par-delà la dimension sociologique, c’est dans l’imaginaire que se déploie la description sociale. Il fait goûter à son auditoire, nombreux et attentif, la grandeur et la beauté de ces longues phrases proustiennes qui caractérisent le style de Claude Simon. Il explique notamment la valeur symbolique de la destruction de l’ancien Palmarium, répudiation d’un passé glorieux, celle du tramway qui reliait le centre-ville à la plage de Canet, métaphore du lien entre le passé et le présent. Il montre avec précision comment les éléments fragmentaires épars dans l’œuvre de Claude Simon permettent de recomposer un tableau de la société qu’il a connu.

Clarté, érudition, émotion ont caractérisé cette conférence brillante et brillamment applaudie.  

Jean Malik Lemaire

 
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